Première rencontre avec les femmes et les mères des quartiers populaires, samedi  15 juillet à Beauvais, dans le cadre du Tour de France organisé par les Marianne de la diversité

Sous la houlette de Fatima Massau, coresponsable de l’antenne Hauts-de- France, une quinzaine de femmes et d’associations ont échangé lors d’un petit- déjeuner convivial. L’objectif de cette rencontre est de donner la parole à ces mères pour voir comment elles ont vécu les émeutes de ces dernières semaines après la mort du jeune Nahel.
Les mots utilisés par ces femmes et mamans et qui reviennent souvent dans la conversation sont : 
colère, révolte, honte, inquiétant, un grand échec de l’État, ou encore une tragédie et c’est malheureux d’en arriver là ! La France n’a jamais été autant malmenée. Une autre dit : on est tous et toutes responsables. Une maman a dit aussi : j’ai mal à ma France qui nous a accueilli, mais comment en sommes- nous arrivés là ? 
La responsabilité est partagée, mais je ne suis pas d’accord quand la police tue, dit une autre maman, c’est un policier qui a tiré et tué un gamin, il n’avait pas ce droit. Et de rajouter : nous avons besoin des forces de l’ordre pour protéger les citoyens. Comme dans une famille il faut rester uni dit une autre.
Une épouse de policier présente lors de la rencontre témoigne aussi : on ne parle pas du travail pénible des policiers, on ne parle pas des suicides dans la police, on ne parle pas des policiers tués. Elle rajoute : cela n’excuse en rien le geste tragique du policier qui doit répondre de ses actes.

Après le ressenti, des constations fusent : problèmes de logements ; pourquoi mettre les étrangers dans des quartiers qui sont devenus des ghettos ; pourquoi mettre les jeunes des quartiers dans des écoles zones sensibles ; où est l’égalité des chances dans une école deux poids deux mesures…

Des mamans ont proposé :

  • le retour de la police de quartier pour favoriser le dialogue entre les jeunes et la police ;
  • l’instruction civique à rajouter au programme scolaire dès la primaire ;
  • le service national universel obligatoire avec rémunération d’au moins un mois voire trois mois ; 
  • la mise en place d’une rencontre parents/prof une fois par trimestre pour faire le point et le suivi des jeunes…

Enfin, il faut parler d’Enseignement et non d’Éducation, car l’éducation se fait à la maison, chacun doit assumer son rôle.

Tribune : le mouvement #Metoo n’est qu’une étape dans le long chemin qui reste à parcourir

A l’occasion de la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes ce 25 novembre, notre Présidente Fadila Mehal a publié cette tribune dans le journal Marianne.

Article original sur marianne.net

Manifestation contre les violences faites aux femmes à Toulouse le 21 novembre 2021. NurPhoto via AFP

En matière de violences faites aux femmes, il y a désormais un avant et un après #Metoo, comme il y a eu par le passé un avant et un après la loi pour l’IVG de Simone Veil. Avec le hashtag #balancetonporc ou #balancetonbar, le féminisme s’est propagé de façon planétaire, prenant le monde à témoin d’une violence exercée contre le deuxième sexe, héritée de siècles de patriarcat. Comme chaque 25 novembre, journée internationale dédiée à ce mal(e?) endémique, en France les études se suivent et apportent leur lot d’interrogations, voire de contradictions.

La dernière en date, commandée à l’Institut CSA par la gynécologue Ghada Hatem de la maison des femmes de Saint-Denis, montre les limites et les paradoxes de ce féminisme offensif et l’ambivalence de ses retombées. Si en 2021 68 % des Français se déclarent féministes (16 points de plus par rapport à 2016) et c’est là une avancée significative, le contrepoint est que pour 70 % d’entre eux, paradoxalement la situation des femmes n’a pas changé ou même s’est dégradée depuis 2016.

Cette étude alourdit le chiffre de 10 % jusqu’alors admis de femmes victimes de violence, pour s’envoler à 56 % des femmes interrogées qui déclarent avoir été victimes de harcèlement sexuel et de viol pour 15 % d’entre elles. Et pourtant l’action gouvernementale en la matière est reconnue unanimement : Grenelle des violences faites aux femmes, numéro vert, modification de la loi, éducation à l’égalité, mesures coercitives ou préventives, la France rattrape peu à peu son retard pour suivre le bon exemple de sa voisine espagnole qui a vu le chiffre des féminicides baisser spectaculairement après une campagne anti-violences très efficace.

Si de nombreuses études ont démontré que les violences anti-femmes sont les mieux partagées quel que soit le milieu social, le territoire, le niveau d’étude ou l’origine, il n’en est pas moins vrai que certaines atteintes sont directement corrélées à des pratiques culturelles ou à l’emprise du religieux. Et les femmes issues de l’immigration en paient un lourd tribut. Entre les crimes d’honneur, les mariages forcés, les excisions et les tabous de la virginité, elles continuent de subir ces violences spécifiques qui s’apparentent à une double peine.

N’est-il pas temps de mettre un coup d’arrêt à ce double asservissement, en tant que femme d’abord (inégalité salariale, plafond de verre) mais aussi en tant que femme issue de l’immigration avec sa cohorte de violences supplémentaires (non-maîtrise de la langue, droit au séjour subordonné aux conjoints violents, etc.) ? Je sais qu’il n’est pas politiquement correct de stigmatiser les hommes issus de l’immigration, eux-mêmes victimes de discrimination et d’exclusion, il reste néanmoins qu’ils peuvent être victimes et bourreaux et cela doit être dénoncé.

De même les femmes handicapées subissent parfois de lourds supplices, comme le montre l’étude réalisée par la sociologue Johanna Dagorn en région Nouvelle Aquitaine qui porte sur le témoignage de 211 victimes. La Secrétaire d’État chargée des handicapés, Sophie Cluzel, a rappelé combien cette situation était prioritaire pour son ministère. Car aux violences sexuelles s’ajoutent pour les handicapées, les maltraitances physiques, verbales, alimentaires, médicamenteuses.

80 % des femmes handicapées, soit quatre femmes handicapées sur cinq sont victimes de violences. Elles se taisent le plus souvent car leur état de dépendance morale ou économique vis-à-vis de leurs agresseurs, la peur de représailles, rend leurs paroles rares voire étouffées. Comme les immigrées, les femmes handicapées restent le point aveugle de #Metoo. Combien de temps faudra-t-il encore attendre pour voir déferler sur les réseaux sociaux, les hashtags qui rendent compte de leurs situations particulières ? #BalancetonMariageforcé, #BalanceTonHandicap.

En France, bien que la situation se soit améliorée au fil des ans, la question des violences faites aux femmes reste d’actualité et bien des bastilles sont encore à prendre. En Europe, depuis 1957 (traité de Rome), l’égalité entre les femmes et les hommes est devenue pour tous les États membres un principe fondamental.

Pourtant aujourd’hui dans certains pays d’Europe, la Pologne ou la Hongrie, les femmes sont de plus en plus dépossédées de leur intégrité physique et voient une brutale remise en cause de leur contraception et de leur droit à l’avortement. En Europe, la tendance ne va pas à une libéralisation des pratiques, à l’image de la Pologne avec une commission européenne impuissante à faire respecter l’IVG, l’Église catholique exerçant une forte influence sur les questions morales et sur la législation.

Tous les droits que l’on croyait acquis peuvent être remis en cause, c’est pourquoi la résistance est de mise et les féministes ne doivent jamais baisser les bras, même en Europe ! Et puis il y a le monde, le reste du monde. L’exemple afghan est terrifiant et limpide à la fois. Les talibans ont fait des femmes leurs cibles car elles représentent pour eux un marqueur civilisationnel. Ils essaient de nous bercer de propos doucereux et certains s’ingénient à nous répéter dans une vision idyllique : « ils ont changé ».

Mais en Afghanistan celles qui y vivent recluses, prises en otage racontent l’enfer des mariages des fillettes avec des vieillards, des viols au sein du mariage, des rapts, laissant épouvante et désolation dans le cœur des femmes. On le voit, le mouvement #Metoo a provoqué une profonde secousse planétaire, éveillant les consciences et libérant la parole de femmes. C’est indéniablement une avancée majeure, mais qui demeure malheureusement une étape dans le long chemin qui reste à parcourir.

À l’approche de ce 25 novembre, il est important de se rappeler que bien des femmes de par le monde subissent encore des violences psychologiques et physiques, certaines en meurent, et que le combat doit être poursuivi, par les réseaux sociaux mais aussi par des mesures radicales pour éradiquer la violence des Hommes.

Fadila Mehal, Présidente fondatrice des Marianne de la diversité